- Que ton nom…
Quand on s’adresse à quelqu’un on aime bien connaître son nom. Qu’en est-il pour Dieu ? Dieu en hébreu c’est El (divinités)… Mais Dieu n’est pas un nom propre puisque c’est d’abord un concept. Quand je dis Dieu : j’ai tout dit et je n’ai rien dit de qui il est vraiment ! Dieu a fait connaître son nom par des paroles et des faits historiques que rapportent les Écritures. En Ex 3 Dieu se révèle à Moïse comme étant « je suis » (Yahweh = tétragramme imprononçable par les juifs à Adonaï-Seigneur). Ce « je suis » sera traduit par Éternel car il est depuis toujours et pour toujours. Tout ce qu’on sait c’est qu’il est… Ex 3,12 il dit « je suis… avec toi » : Dieu assure Moïse et son peuple de sa présence fidèle tout au long de son histoire.
1° Un nom = Dieu n’est donc pas un être anonyme. Mais bien une personne qui peut être identifiée et interpellée. Elle devient un vis-à-vis avec qui je peux entrer en relation, à qui je peux m’adresser et parler. Et non pas une sorte d’énergie, une idée abstraite, le dieu inconnu des Grecs (Ac 17). Quand Jésus enseigne aux disciples à prier en invoquant Notre Père, il reprend la révélation faite à Moïse (« il est ») enrichie par « notre père ». Confesser la paternité de Dieu, c’est en effet confesser la relation d’amour que le Dieu de Jésus veut avoir avec chacun de ses enfants.
2° Plus important encore : le nom de Dieu définit, exprime, révèle l’identité profonde et la nature même de sa personne. Dans l’Ancien Testament, on rajoute au mot EL des qualificatifs ou expressions complémentaires pour exprimer sa grandeur et tous ses attributs (El Shaddai = Tout-Puissant, El Elyon, El Olam, El Roï). Son nom reflète sa nature, sa personnalité. Son nom est comme lui : Saint, grand, glorieux, puissant. Il est synonyme de justice, amour, perfection, infini…
3° Le nom représente cette personne. Et manquer de respect pour le nom c’est manquer de respect pour la personne. Les israélites avaient un grand respect pour le nom de Dieu. On ne le prononçait jamais, mais on le désignait par une périphrase : l’Éternel, le Tout-Puissant, etc.
2. Soit sanctifié. Dieu est saint par nature :
1° Saint = à part ; différent de tout ce qui est ordinaire ; Dieu est tout-autre : on ne peut le confondre avec quoi que ce soit de la création. Il appartient à une autre sphère de qualité (parfait) et d’essence (éternel).
2° Sanctifier = litt. mettre à part. « Que ton nom soit mis à part de tous les autres ». Contraire = profaner qui signifie remettre dans le commun. En grec = ce qui n’est pas mélangé (or pur non mélangé avec d’autres métaux).
3° Tu seras saint comme je suis saint (Lv 20,26) : devenir saint = pas être moralement parfait. Mis à part pour une mission ou un service précis : faire connaître le nom de l’Eternel, annoncer son action à toutes les nations, refléter qui il est : sa sainteté, son amour, sa justice et ce en paroles et en actes.
Or Ézéchiel reproche à son peuple exilé parmi les païens d’oublier, de mépriser, de tourner en ridicule le nom de Dieu… Or Dieu est attaché à l’honneur de son nom (= sa réputation). Et quand quelqu’un a mauvaise réputation, que fait-on ? On n’a pas envie de le connaître, On ne lui fait pas confiance… Mais « eu égard à son saint nom » Dieu ramènera son peuple de l’exil afin que son peuple remplisse sa vocation de faire connaître à tous les hommes le nom de Dieu. C’est cette vocation qui fait qu’Israël est une nation sainte. « Les nations sauront que je suis l’Éternel quand je serai sanctifié par vous sous leurs yeux » (Ez 36,23).
Sanctifier le nom de Dieu, c’est donc le mettre à part, c’est lui faire une place toute particulière dans notre cœur et dans notre vie. Lui donner une place à part parmi les réalités quotidiennes de notre vie. Un théologien parlait d’en faire notre « préoccupation ultime ». Si Dieu est à part, il n’entre pas en concurrence avec nos autres préoccupations. Attention l’objectif n’est pas de renoncer à toute dimension matérielle mais de placer la fidélité à Dieu au-dessus de tout. Quelle préoccupation dirige toutes les autres ? Quand nous la mettons ailleurs qu’en Dieu cela s’appelle de l’idolâtrie.
Qui sanctifie son nom ? Dieu lui-même ? Celui qui prie ? L’Église ? Il le sanctifie en révélant sa force, sa gloire et sa sainteté au travers d’actes puissants. Nous prions qu’il soit encore et toujours sanctifié comme il sera pleinement sanctifié quand son autorité sera établie sur toute la terre à la fin des temps.
Mais nous avons aussi notre part de responsabilité (cf. Ez). Jésus nous présente Dieu comme Père. En tant qu’enfant de Dieu nous portons ce nom sur nous et si nous voulons qu’il soit sanctifié, reconnu, glorifié, respecté il faut que notre vie reflète qui il est. Ce nom ne peut pas être galvaudé. Nous le galvaudons lorsque nous nous ne nous conduisons pas comme des fils.
En Mt 5 Jésus dit que nous sommes les fils du Père quand : on aime nos ennemis, bénit ceux qui nous maudissent, prie pour ceux qui nous maltraitent ! Des fils se conduisent vraiment comme des fils en reflétant l’amour du Père ! Si je dis « mon Père », je dois être cohérent avec ce que je confesse !
Nous avons cette responsabilité de représenter le nom du Seigneur dans nos vies devant le monde. Or Paul écrit en Rm 2 : « le nom de Dieu est à cause de vous blasphémé parmi les païens ». Dur à entendre… Ils étaient censés être mis à part pour le faire connaître… mais leur mauvaise conduite discréditait leur message. Quand un nom est sali c’est la personne qui est salie. Or Dieu est amour, saint, juste. Question : comment le sanctifions-nous ? En lui rendant le culte et l’adoration qu’il mérite, par notre écoute de sa Parole, par notre obéissance et notre fidélité à sa volonté (cf. ce que dit Mt 5). Mais aussi quand, en son nom, nous agissons pour des relations et une société toujours plus juste et fraternelle respectant le droit et la justice !
A quel moment on ne le sanctifie pas ? A chaque fois que c’est d’abord nous que nous cherchons à mettre à part… Depuis Babel, nous ne prions pas pour que Dieu se fasse un nom mais pour chercher à nous faire un nom (Gn 11,4). Que mon nom soit sanctifié, reconnu, applaudi, glorifié ! Le nom de Dieu leur importe moins que le leur, que leur prestige, leur influence, leur pouvoir… Il peut être instrumentalisé de façon éhontée à des fins guerrières, politiques (Russie ou usa) ou personnelles pour justifier nos propres intérêts, ambitions ou idéologies…
Il n’est pas sanctifié quand nous le prenons pour alibi pour faire du tort à nos frères et sœurs au lieu de les aimer…Ou pour couvrir d’un vernis religieux nos actions néfastes… Ou quand j’utilise son nom comme un formule magique… Bref, demandons-nous de quelle façon nous pouvons parfois galvauder son nom et nuire à sa réputation…
3. Jésus, le nom au-dessus de tout nom
Selon Calvin, ce qui nous empêche le plus d’honorer son nom : l’ingratitude et l’indifférence envers Dieu… Tim Keller a écrit : « Sanctifier son nom c’est élever un cœur rempli de joie reconnaissante envers Dieu et être émerveillé par sa beauté… ». Or son nom évoque 1001 raisons d’être reconnaissant et de le célébrer ! Mais la plus significative s’appelle Jésus ! Il est le nom au-dessus de tout nom qui porte le grand projet de Dieu pour l’humanité : il sauvera son peuple de ses péchés (Mt 1,21). Il est Yeshoua, Dieu sauve… Il est Emmanuel, Dieu avec nous (dans notre Histoire/présence au quotidien).
En Jean 17 Jésus explique qu’il a fait et fera connaître le nom de son Père. Sanctifier le nom de Dieu c’est reconnaître que nous ne pouvons rien dire de lui en dehors du Christ. Car Dieu se révèle pleinement en Jésus. En fait, tout dans la vie et la personne de Jésus proclame la grandeur du nom de Dieu. Tout en lui dans sa vie et dans sa mort disait ce que Dieu est : grand, saint, juste, amour, créateur, rédempteur…
Le Fils de Dieu lui-même est saint/sanctifié : par sa mort il s’est mis totalement à part pour nous pour que nous puissions être mis à part pour lui… Le scandale de la croix nous fait comprendre jusqu’où va la profanation du nom de Dieu. Mais, à cause de cette profanation ultime, Dieu fait la grâce d’une alliance nouvelle offerte à tous les hommes qui le reconnaissent comme leur Père.
L’Église est mise à part pour faire connaître son nom. 1 Pierre 2,9 dit : « vous êtes une nation sainte, le peuple de Dieu, afin que vous annonciez les vertus de celui qui vous a appelé des ténèbres à la lumière ». Individuellement et communautairement nous avons été mis à part, choisis, appelés pour sanctifier le nom du Père et vivre d’une manière qui honore ce nom et rend témoignage de sa sainteté. Et c’est par nos actes et nos paroles que le monde pourra entendre l’appel de Dieu. » A l’amour que vous aurez les uns pour les autres, tous connaîtront que vous êtes mes disciples » dit Jésus (Jean 13/35).
Le sceau du nom de Dieu est apposé sur le front de tous les chrétiens baptisés. Nous mettons son nom à part lorsque nos pensées, nos paroles et nos actes reflètent le caractère de Dieu tel qu’il s’est révélé en Jésus-Christ. Afin que Dieu soit reconnu, honoré, glorifié dans nos vies.
Conclusion : Prier « que ton nom soit sanctifié » revient à dire : « Père, sanctifie-toi en moi (occupe une place totalement à part en moi), parce que ton Fils s’est sanctifié pour moi et qu’il m’a aussi sanctifié pour le service de Dieu et de mon prochain, par la puissance du Saint-Esprit ». Amen
Textes : Jn 17,6,26 ; Ex 3 ; Ez 36, 16 à 28 ; Jn 17, 17 à 19 ; I Pi 2, 9 à 10.
