Prédication sur Jonas 1,15 – 3,2.

Fuite, prière et promesse de renouveau pour Jonas.

Chers amis,

Il est des moments dans la vie où il nous semble avoir été mis à l’écart par les circonstances. Jonas doit vivre cette expérience durant ces 3 jours et 3 nuits passés dans le ventre du poisson. Lui qui fuyait toute rencontre avec le Seigneur, le voilà qui se sent rejeté par Lui. Jonas… je l’aime bien… tant nous pouvons nous identifier à lui. Il y a une semaine, nous avons vu que Jonas fuyait Dieu, se fuyait lui-même, fuyait sa mission de prophète, qui il était appelé à être. En fuyant, il finit… replié sur lui-même, en boule, au fond du bateau, caché dans un recoin. C’est comme s’il se retrouvait au pied du mur, acculé… coincé, prisonnier de sa fuite ; il sombre dans un repli sur soi et un apitoiement sur soi. Sa situation peut s’apparenter à une fuite produite par l’orgueil : il tient tête à Dieu. Il veut avoir le dernier mot. C’est le capitaine qui va dévoiler son orgueil en le sommant de sortir de son repli sur soi. Mais notre fuite peut aussi être le résultat d’une peur, ou d’une anxiété : peur de faire face à ce qui nous arrive, à ce qui est demandé de nous. Cette fuite peut encore est mue par la culpabilité : tu te rends que tu as fait le mauvais choix (partir à Tarsis) et tu ne peux plus revenir en arrière.

Jonas, à ce point-là de sa vie, décide quand même de prier. Je crois qu’il prie au fond du bateau, il prie dans son apitoiement sur soi. Il se rend compte que quelque chose ne tourne pas rond. Il demande de l’aide. Et Dieu exauce sa prière, en le faisant jeter par-dessus bord, dans la mer. J’ai appelé au secours et tu as écouté. Tu m’as jeté dans un bas fond au cœur des mers. La réponse à sa prière c’est qu’il accepte de quitter le bateau où il se cachait. Comme Pierre qui sort de la barque pour aller vers Jésus en marchant sur l’eau. Pierre qui va surmonter la peur qu’inspirent les vagues, la mouvance de la situation et la tempête en fixant son attention sur Jésus.

Jonas prie dans sa fuite. Voilà qui nous encourage à prier aussi dans nos moments de fuite, de déroute, de désarroi, d’envie de tout abandonner. Jonas s’adresse à Dieu du milieu de sa fuite loin de Dieu. Et le Seigneur accueille sa prière. Il accueille aussi ta prière. Il dresse l’oreille et attend ta prière. Il y répondra, pas forcément comme tu aimerais, mais il répondra.

Dieu répond à Jonas. Arrêtons-nous sur ce qu’il va vivre et voyons  en quoi cela peut nous rejoindre.

Jonas va passer 3 jours et 3 nuits dans le ventre du poisson. L’interprétation rabbinique[1] du texte dit que ces 3 jours c’est le temps où Dieu travaille à transformer une perte en un gain, une situation d’angoisse et de détresse en une libération. C’est un moment où l’être humain n’a pas grand-chose à faire, sauf laisser faire. Jonas ne peut rien faire, il est prisonnier du ventre du poisson. Dans ce ventre, il est comme mis à l’écart, comme englouti ; il disparaît, avalé par la mer… C’est pour le coup qu’il semble parti… pour de bon[2]. Et parfois, nous nous sentons ou nous nous retrouvons dans cette situation. Cela peut sembler de prime abord ennuyeux pour qui voudrait résoudre ses problèmes lui-même. Nous pouvons alors nous souvenir de 3 choses :

  • si tu as l’impression que tu as été passé par-dessus bord… sache que Dieu a préparé le poisson qui va t’abriter; les rabbins disent que Dieu créa ce poisson tout exprès pour Jonas le 5e jour de la Création, comme il créa tout exprès ce même jour le bélier qu’Abraham allait sacrifier à la place d’Isaac. Dans le récit de Jonas, on observe la maîtrise de Dieu sur les circonstances : il est derrière la tempête, il guide la tirée au sort, il dépêche le poisson, il fera pousser un ricin et asséchera le ricin. Dieu est donc maître de tes circonstances. Si tu as confié ta vie au Seigneur, tu peux être assuré de cela. Confier sa vie au Seigneur ne signifie pas ne pas succomber à la tentation de le fuir soudain, ni être épargné par les épreuves. Je redis ce que j’ai dit il y a une semaine. Les initiales du poisson en grec sont celles de Jésus Christ Fils de Dieu Sauveur. Cette mise à l’écart… Dieu en est souverain. Ou dit encore autrement : tu peux inviter le Seigneur à habiter cette mise à l’écart. Cette mise à l’écart devient lieu de calme et de repos parce que Jésus l’habite.
  • ce temps de 3 jours c’est comme le passage de la mer rouge, de la mer des joncs. Un moment qui va aboutir à une libération. Il y a, autant dans ce moment de mise à l’écart que dans la détresse de Jonas recroquevillé sur lui-même, quelque chose de matricielle, quelque chose qui porte la vie en germe, le renouveau en espérance[3]. Il va en naître quelque chose que Dieu prépare pour toi[4]. Pas forcément quelque chose de nouveau. Mais plus sûrement un renouveau en toi. Ce renouveau… Jonas le pressent et il l’attend avec foi, car il connaît son Dieu comme Dieu qui fait grâce et qui est compatissant, lent à la colère et riche en bienveillance (Jonas 4,2). Et il proclame dans la foi ce renouveau : Tu m’as jeté dans l’abîme, je me disais je suis chassé loin de toi, MAIS je verrai encore ton saint temple… ma prière est arrivée jusqu’à toi.
  • en effet, dès que Jonas retrouve la terre ferme, il retrouve l’appel qu’il fuyait, le Dieu qu’il fuyait, la mission qu’il fuyait. Dieu ne change pas. Ma prière ne va pas faire plier le Seigneur. Ma prière va me rendre souple dans sa main pour accomplir sa volonté. Cela peut parfois nous enrager… mais finalement cela est notre plus grande assurance : Dieu ne change pas. Sa grâce pour toi ne change donc pas non plus. Son amour pour toi ne change pas non plus. Sa volonté pour toi ne change pas non plus. Donc si tu vois ton enfant prendre le bateau pour Tarsis… tu peux être confiant que la bienveillance du Seigneur pour lui ne change pas… même s’il ou elle va peut-être passer par une sacré tempête pour s’en rendre compte et y adhérer. Ce qui est valable pour nos proches l’est pour nous.

Croyons à ce renouveau que Dieu veut faire naître en nous, parfois aussi dans nos circonstances, mais je crois d’abord en nous. Dans nos fuites, alors que nous nous replions sur nous-mêmes, ne cessons pas de prier, car le Seigneur nous prépare à nous élargir, à nous ouvrir, à élargir notre vision, notre cœur[5]. Il n’est pas nécessaire de vivre une crise pour cela, nous pouvons aussi le vivre en prenant des temps de mise à l’écart volontaire avec le Seigneur

Cela dit, il y a encore un aspect de l’expérience de Jonas que nous ne pouvons pas passer sous silence, sous peine de ne dire qu’une demi-vérité.

Si tu as l’impression durant ce temps d’été que tu te situes dans une logique de fuite… que tes vacances se font l’expression d’une fuite plutôt qu’un temps de ressourcement et de renouvellement… arrête-toi avant de monter sur le bateau à destination de Tarsis. Et laisse-toi inspirer par la prière de Jonas qui dit : 7 Quand mon âme était abattue au dedans de moi, je me suis souvenu de l’Eternel, et ma prière est parvenue jusqu’à toi. 8 Ceux qui s’attachent aux vanités trompeuses et futiles abandonnent la grâce qui est à eux.

Lorsque nous fuyons la mission que Dieu nous a confiée, et parfois cette mission consiste tout simplement à fleurir là où il nous a placés, à être ses témoins dans la situation où nous sommes… lorsque nous nous fuyons nous-mêmes, il y a une probabilité que nous soyons en train de nous attacher à quelque chose qui n’en vaille pas la peine : une vanité futile. Peut-être cette vanité nous semble-t-elle raisonnable : par ex. vouloir une vie plus facile ; donner suite à une ambition légitime mais qui coûtera de précieuses relations ; changer d’horizon conjugal ; être comme tout le monde et suivre le courant plutôt que d’être témoin des valeurs que Jésus nous inspire, etc.

La part de Jonas dans tout ça a été de s’abandonner au Dieu qu’il fuyait, à Sa Grâce et à Sa Bonté qui lui était destinées, imméritées et immuables.

Amen.

 

[1] Cf. Jonas, un conte théologique, Cahier Evangile n°110, éd. du Cerf, Paris 2000, p.34-35.

[2] Parfois aussi, nous assistons à cela dans la vie de nos bien-aimés : ils sont engloutis… dans une situation où nous n’aimerions pas être à leur place.

[3] Jonas 2,1 Jonas, dans le ventre* du poisson, pria l’Eternel, son Dieu. 2 : Dans ma détresse, j’ai invoqué l’Eternel, Et il m’a exaucé ; Du sein du* séjour des morts j’ai crié, Et tu as entendu ma voix.

* 2 mots hébreux pouvant être traduit par matrice.

[4] Pour les amateurs d’Eric-Emmanuel Schmitt, dans son livre La nuit de feu, il semble faire une expérience semblable à celle de Jonas, suite à laquelle il trouve la foi : lors d’une excursion sur le Tahat, point culminant de la région, il se perd et est contraint de passer la nuit seul dans le désert dans un lit de sables qu’il s’est constitué. Lors de cette nuit, Eric connaît l’illumination et retrouve le groupe le lendemain avec une Foi toute neuve et une paix profonde qui l’habite encore aujourd’hui (Wikipédia). La description qu’il fait de son égarement loin de son groupe de randonneur et de sa nuit en solitaire ressemble à la descente de Jonas. Peut-être un bonne lecture pour tes vacances!!!

[4] Jonas doit encore prendre conscience que Dieu n’est pas juste intéressé à sa petite personne, ni à son peuple, ni à sa nation, mais qu’il est intéressé au salut de l’ennemi de son peuple, au salut de tous finalement.

 

 

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