Prédication sur Luc 5,1-11 / Jean 4,10-11.

Ancrer mes espoirs / espérances hors des sentiers battus.

Bien-aimés du Christ,

Pour entrer dans ce texte de Luc, je vous pose cette question : quelle est votre espérance ? Qu’espérez-vous pour vous-même, pour votre vie, pour ce monde ?

Et sur quoi s’appuie votre espérance ?

François Varillon dit que le contenu de notre espérance c’est toujours la recherche d’une libération. (…) Pour vivre une vie qui soit vraiment humaine. Pour être plus homme dans une société plus humaine[i]. Et Varillon de demander ce que signifie être humain.

Revenons à notre texte. Les gens qui entourent Jésus de toute part, qui le serrent… eux aussi espèrent quelque chose. Au chapitre 4 de Luc, on voit que Jésus a guérit de très nombreuses personnes. J’imagine qu’ils sont impressionnés, que dans cette foule il y en a encore qui espèrent être vu, être touché, être guéri par Jésus. Et il y a ceux qui sont captivés par son enseignement, qui espèrent qu’il soit le Sauveur promis par les prophètes de l’Ancien Testament. Attentes de solution, attentes de vérité, attentes de sagesse, d’orientation pour vivre. Attentes de miracles. Et leurs espérances, leurs attentes pressent Jésus, exercent une pression sur lui. Alors il veut s’en dégager et s’installe dans la barque de Simon pour leur parler.

Et puis, il y a fort à parier que Simon aussi doit espérer quelque chose. Il espère peut-être pouvoir nettoyer au plus vite ses filets, avoir fini son boulot pour disposer d’un temps de repos avant de repartir à la pèche la nuit prochaine. Il espère peut-être que la prochaine pèche sera plus fructueuse : c’est sa source de revenu.

Bref. Jésus prend distance de la foule. Puis, Jésus invite Simon à prendre distance de sa nuit de travail qui n’a rien rapporté. J’aimerais m’arrêter sur 2 éléments.

Le 1er est contenu dans cette invitation de Jésus à Simon : Avance en eau profonde et relance tes filets. Avance en eau profonde. Ça me rappelle le sens littéral du mot baptiser, tel que l’avons vu lors de notre préparation : baptiser signifie à la base plonger dans, immerger, mariner. C’est comme si Jésus nous disait : tu peux rester à la surface de ton baptême, tu peux rester à la surface du lien que tu as avec moi ou tu peux approfondir…. Il nous arrive de rester à la surface de notre foi… on s’arrête devant ce qui nous semble compliqué de comprendre, devant ce qui nous semble difficile à accepter pour notre raison, devant les malheurs de ce monde. On reste aussi à la surface car notre espérance, nos espoirs sont ancrés dans ce que nous connaissons, dans ce qui nous est familier. Nous espérons que les politiques mettront fin à la guerre, nous espérons que la science trouvera la solution aux maladies, nous espérons que nous aurons la force d’assumer le stress au travail, etc. Nous espérons donner un bel avenir à nos enfants. Nos espoirs sont ancrés dans ce que nous pouvons, dans ce qui dépend de nous.

Et voilà que Jésus nous invite à sortir des sentiers battus. Il nous invite aussi à dépasser nos frustrations, nos déceptions, notre sentiment d’inutilité, ce qui nous apparaît comme des temps de sécheresse existentielle. Et à avancer en eau profonde. Comme dirait Antoine Nouis : il nous invite à l’aventure.

Faisons rapidement un zoom sur Simon. Au chap. 4 de l’évangile de Luc, Jésus guérit la belle-mère de Simon. Simon a donc assisté à un miracle dans sa famille. Sans parler de tous les autres miracles que Jésus a opéré à Capernaum : Simon est au courant, il y a assisté peut-être lui-même. Il n’est pas dit qu’au moment de ces miracles, Simon a été saisi de frayeur. En fait, on observe que Simon a été spectateur, sans plus, de l’intervention de Jésus dans la vie de sa belle-maman. Il a contemplé cette action. Sans plus. Comment dire ? Vous savez, il y a des gens qui ont, dans leur salon, une armoire vitrée dans laquelle ils mettent soit les coupes et médailles reçues lors de compétitions sportives, soit des souvenirs de vacances. Et puis c’est là juste comme souvenir. Mais c’est passé. Et là, Jésus demande à Simon de participer, de devenir participant actif de son action à Lui. Pour nous, on a été baptisé, on a vécu ce qu’on a vécu avec Christ Jésus… mais c’est parfois un souvenir lointain qu’on regarde comme spectateur. C’est juste un événement passé. Et Jésus nous demande de devenir acteurs dans le lien qui nous unit à Lui. Parce que Lui, il veut être actif dans notre quotidien.

Voyez-vous, cette frayeur de Simon suite à cette pèche extraordinaire, n’est-elle pas étrange ? Jésus n’a-t-il pas résolu son problème de manque à gagner ? Cette frayeur ce n’est pas de la peur au sens basique. C’est ce sentiment d’être dépassé par quelque chose de plus grand, de trop grand. C’est ce sentiment d’émerveillement qui nous interroge sur nous-mêmes. C’est l’étonnement de voir ce que Christ Jésus, Dieu peut faire avec nous : parce que… c’est bien lui, Simon, qui a piloté le bateau et jeté le filet, mais avec Jésus, en sortant des sentiers battus : à l’époque on ne s’éloignait pas trop du rivage pour pécher.

Simon va par la suite intégrer cette leçon de vie. En effet, lorsqu’il est pris dans une tempête avec les autres disciples et que Jésus les rejoint en marchant sur l’eau, il est celui qui va dire à Jésus : si c’est toi, dis-moi de venir vers toi en marchant sur l’eau (cf. Mt 14).

Intégrer Jésus dans mon quotidien va me conduire en eau profonde. Intégrer Jésus dans mon quotidien va contribuer à m’aider à prendre distance face aux attentes et espérances que les autres exercent sur moi.

Intégrer Jésus dans mon quotidien va me montrer que c’est avec le Seigneur que nous devenons des humains qui réalisent leur humanité. Au service les uns des autres. En comptant sur une ressource qui dépasse et traverse nos propres capacités. Intégrer Jésus dans mon quotidien m’aide à ancrer mes espérances ailleurs que dans ce qui dépend de moi, hors des sentiers connus.

Baptiser notre enfant c’est l’ouvrir à l’aventure de la foi qui ose sortir des sentiers battus, aventure qui conduira vos enfants à oser la profondeur avec Dieu et leur prochain. Aventure qui leur fera découvrir que Jésus est avec eux dans la barque de leur vie, mais aussi que Jésus veut agir au travers d’eux pour réveiller une espérance qui voient plus loin que l’immédiat de nos rivages. Aventure qui nous invite à nous laisser libérer des pressions de la foule. Aventure qui nous fait découvrir que Dieu est avec nous. Aventure qui va transformer nos espérances. Aventure qui va ancrer nos espérances en eau profonde.

Amen.

[i] François Varillon, Joie de croire, joie de vivre, Paris, Centurion, 1981, p.211.

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