Prédication sur Mt 26.28 (26-29) et 1Co 11.25 (23-27) et Ex 24,7-8.

La Cène, lieu d’une alliance à honorer de notre vie.

Bien-aimés du Christ,

Depuis le 20 janvier de cette année, nous assistons à une redéfinition du concept d’allié et d’alliance par M. Trump. Selon lui, une alliance n’est valable que si elle sert ses intérêts économiques. Indépendamment de ce qu’on pense du bonhomme, je me dis qu’il est la caricature de nos propres égoïsmes. Il suffit de penser au nombre de fois où on remet en question un engagement pris car il ne sert plus nos intérêts, notre plaisir ou notre satisfaction.

Et voici que Jésus et Paul présente la Cène comme un moment où l’on célèbre une alliance. L’alliance que Dieu fait avec nous par le sang de Jésus. Jésus viendrait-il aussi chambouler le concept d’alliance ?

Qu’est-ce qu’une alliance ? C’est quand 2 partis s’unissent par un engagement formel en vue d’un but commun, pour faire simple. La plus belle image en est le mariage entre un homme et une femme qui unissent leurs existences en vue d’un projet de vie commun. Et qui vont chacun se donner à l’autre pour cela. Ils portent chacun un anneau rappelant cet engagement. Une alliance est un engagement mutuel.

Dans le monde religieux antique, le Dieu d’Israël vient chambouler le concept d’alliance. En effet, il prend l’initiative de choisir ce peuple pour faire alliance avec lui, non parce qu’il le mériterait, mais simplement parce que Dieu a choisi de l’aimer[1] et d’en faire son peuple pour être bénédiction pour les autres[2]. Sceller une alliance avec du sang c’est exprimer son caractère le plus sacré et vital qui soit, c’est dire que cette alliance est une affaire de vie ou de mort. Dans l’AT, Dieu prend un engagement de salut envers son peuple et lui demande en échange confiance et obéissance. Toutefois, là où il redéfinit le concept d’alliance, c’est que Lui, Dieu, le maillon fort de l’alliance choisit de rester fidèle à son alliance malgré nos infidélités, et donc aussi quand il sort lésé par nous dans le contrat nous liant à Lui.

Cette alliance trouve son accomplissement en Jésus où Dieu se donne lui-même à nous à la Croix pour nous attester et nous déclarer son amour et son pardon. Jésus scelle de sa vie cette alliance divine. Il scelle de sa vie l’alliance d’amour que Dieu fait non seulement avec Israël mais avec l’humanité entière. La Ste Cène nous le rappelle au travers du pain et du vin signifiant la vie de Jésus donnée pour nous.

Cela dit, j’aimerais m’arrêter sur 3 aspects de cette Alliance.

Jésus dit en tendant la coupe à ses disciples : Ceci est mon sang, le sang de la nouvelle alliance répandue pour beaucoup pour le pardon des péchés. Alliance de pardon. Alliance de grâce. Le mot pardon en grec veut aussi dire répudiation. Jésus donne sa vie pour sceller une alliance de pardon avec nous. Il répudie notre faute, il la jette derrière Lui, il s’en détache, il s’en défait. Dieu nous aime et il nous regarde au travers de son amour. Il nous voit souffrir et il pleure avec nous en attendant le moment où nous nous laisserons guérir par son amour. Il nous voit trébucher, faire mal, faire du mal et il souffre en attendant de nous voir nous en rendre compte et nous repentir. Son alliance lui en coûte. Son alliance, il le sait, est une affaire de vie ou de mort pour nous. Il ne cesse de nous rappeler cela à chaque Cène. Son alliance est irrévocable !

Suis-je conscient de cela quand je viens à la Ste Cène ? Le pardon reçu d’une personne que j’ai offensée est toujours un grand cadeau : c’est un cadeau qui permet de repartir à zéro, qui permet de réenvisager la rencontre avec l’autre dans la liberté, qui rend un souffle de vie et de soulagement. Le pardon reçu implique aussi d’avoir conscience de son importance, de sa valeur. Donc aussi de la blessure causée par l’offense. Cette alliance que Jésus scelle de sa vie manifeste la blessure que nous causons par notre égarement à l’amour de Dieu pour nous. Cette alliance que je célèbre nous met devant notre responsabilité de nous remettre en question, mais nous permet aussi d’entrer dans la joie du pardon, du recommencement possible. C’est pour cela que jadis on demandait aux communiants de s’examiner et de se préparer à la Ste Cène durant les semaines la précédant. Pas par plaisir de s’auto-flageller, mais par conscience aigüe de la sacralité de ce qui s’est joué ce jour où Jésus a donné sa vie pour nous.

Répandu pour beaucoup. Pas seulement pour moi, pour toi aussi. Pas seulement pour toi, pour moi aussi. Pas seulement pour nous, mais pour les autres aussi. Ce que nous célébrons à la Cène doit nous remplir d’humilité, ça devrait arracher de nous toute velléité d’arrogance ou tout sentiment de supériorité.

2e élément. Qui dit alliance dit au moins 2 partis. Une alliance c’est un pacte mutuel au service d’un projet commun. Même si Dieu en prend l’initiative, il n’en demeure pas moins que je suis appelé à y répondre. Quand je viens à la Ste Cène, je reconnais l’Alliance que Dieu fait avec nous, je manifeste que j’accepte d’y entrer, et d’y donner mon assentiment. Je reçois cet Amour et ce Pardon que Dieu me donne, scellé par la vie de Jésus. Et je manifeste que je choisis d’assumer ma part de l’alliance, celle que Dieu me demande : Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. Faites-vous grâce mutuellement comme je vous ai fait grâce. Soyez artisans de paix entre vous comme je l’ai été pour vous. Comme le Père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie dans ce monde pour être témoin de son Amour et de son Pardon.

Suis-je conscient, es-tu conscient qu’en prenant le pain et le vin tu intègres cette Alliance ? Tu n’en es pas que le bénéficiaire, tu as aussi désormais une responsabilité. Responsabilité de la refléter pour le moins. Nous en parlerons plus le 16 novembre.

Je me suis demandé : as-tu fait alliance avec ton Sauveur ? Je me suis souvenu de ma confirmation. Oui j’ai fait alliance avec mon Sauveur. A l’époque je l’ai exprimé publiquement. Ce souvenir m’aide lors de mes crises de foi. Et toi, as-tu fait alliance avec Jésus ton Sauveur ?

3°. Faire alliance avec le Seigneur ne signifie pas être parfait. Loin s’en faut. Faire alliance avec le Seigneur c’est faire le choix fondamental de lui faire confiance, de l’aimer et de lui obéir. Tout en sachant que nous allons trébucher, tomber et retomber et encore retomber. Intéressant que lorsque Moïse scelle l’alliance entre Yahvé et Israël au désert, le peuple répond : Tout ce que le SEIGNEUR a dit, nous le ferons et nous l’écouterons. D’abord obéir, puis écouter. Ce n’est pas bizarre, ça ?… Antoine Nouis dit que derrière le verbe écouter il y a aussi comprendre, devenir sage. C’est en s’exerçant à la confiance, à l’amour de Dieu et du prochain, à l’obéissance que nous comprenons peu à peu la profondeur, la richesse, la vitalité de cette alliance d’amour et de pardon. C’est pourquoi je peux venir à la Cène même en ayant conscience de mon indignité. C’est là que le Seigneur veut me redire son amour et sa grâce. C’est là qu’il veut me relever. C’est là que je peux écouter son Esprit Saint me ré-attester de son amour. C’est là que son Esprit pourra me chuchoter ses encouragements pour reprendre mon chemin de foi, de confiance et d’obéissance. C’est là que son Esprit Saint redonnera souffle à ta gratitude, à ta louange pour ce qu’il a fait pour toi. C’est là qu’il te donnera une compréhension renouvelée de tes engagements envers Lui.

Prions.

Seigneur Jésus-Christ, Dieu notre Sauveur, merci pour cette Alliance d’amour et de pardon que tu as faite avec nous. Merci de l’avoir confirmée en donnant ta vie à la Croix pour nous. Merci de pouvoir nous reposer sur cette Alliance quand nous trébuchons, quand nous doutons, quand nous faisons tout faux et que ça part en cacahuètes dans notre vie. Merci de pouvoir alors venir à toi, recevoir les signes de ton pardon et de ta grâce. Merci aussi parce que tu nous rappelles alors, que tu nous veux toujours encore partie prenante de ton alliance. Aide-nous à t’honorer, aide-nous à t’honorer de notre vie, de notre foi, de nos recommencements. Amen.


[1] Cf. Deut 7 : 6  Car tu es un peuple saint pour l’Éternel ton Dieu ; l’Éternel, ton Dieu, t’a choisi pour que tu sois un peuple qui lui appartienne en propre parmi tous les peuples qui sont à la surface de la terre. 7  Ce n’est point parce que vous surpassez en nombre tous les peuples, que l’Éternel s’est attaché à vous et qu’il vous a choisis, car vous êtes le moindre de tous les peuples. 8  Mais parce que l’Éternel vous aime, parce qu’il a voulu tenir le serment qu’il avait fait à vos pères, l’Éternel vous a fait sortir à main forte, vous a libérés de la maison de servitude, de la main du Pharaon, roi d’Égypte. 9  Tu reconnaîtras donc que c’est l’Éternel, ton Dieu, qui est Dieu. Ce Dieu fidèle garde son alliance et sa bienveillance jusqu’à la millième génération envers ceux qui l’aiment et qui gardent ses commandements.

[2] Genèse 12,2.