21/05/2017 – Le malheur: punition de Dieu? (Jn 9,1-7; Lc 13,1-5; Jb 1,9)
Combien de fois n’ai-je pas entendu cette phrase “qu’ai-je fait au bon dieu pour mériter cela” ou encore “Dieu l’a puni pour ce qu’il a fait”. Le malheur est-il une punition de Dieu ? Je ne crois pas. Mais quand le malheur frappe la réaction qui vient spontanément c’est “pourquoi ?”. Et les disciples posent cette question à Jésus : “pourquoi est-il aveugle ? Est-ce à cause de son propre péché ou à cause de celui de ses parents ? Jésus dénonce ici une fausse croyance. Ni l’un ni l’autre ! « Il est aveugle pour que l’œuvre de Dieu puisse se manifester en lui ». Jésus dénonce ici 2 façons erronées de comprendre/concevoir la souffrance :
- Les fausses voies / réactions face au malheur.
Celle de la colère. C’est aussi celle du bouc-émissaire. Si je souffre c’est de la faute à quelqu’un d’autre. C’est tellement plus facile de trouver quelqu’un à blâmer, un responsable de mon malheur contre lequel je puisse être en colère. Cela peut être contre Dieu. « Pourquoi moi, il y a tellement de personnes qui le méritent plus que moi et qui s’en sortent plutôt pas mal » !
Celle de la culpabilité. Il est aveugle parce qu’il a péché, c’est donc de sa faute. Sauf qu’il l’est depuis sa naissance ! Ici on ne cherche pas un facteur extérieur, mais intérieur qui fait dire à la personne « s’il m’arrive ça, c’est que c’est de ma faute, je dois être une mauvaise personne, sinon ma vie irait mieux ». On a vite fait de tomber dans la fausse croyance : s’il t’arrive malheur c’est que tu n’as pas la foi ou c’est à cause de tes mauvaises actions. D’ailleurs les gens deviennent souvent très religieux et pensent qu’à force de respecter les commandements, de faire le bien, de servir Dieu, celui-ci leur devra une belle vie sans malheur.
« Pourquoi Dieu permet-il cela ? » Ce genre de question présuppose que Dieu nous doit une vie confortable ! Mais Dieu ne nous doit rien ! C’est nous qui lui devons tout ! Pourquoi la vie n’est pas confortable ? A cause du péché. Mais retenons bien ceci : un problème personnel n’est pas causé par un péché en particulier. La souffrance ne vient pas d’un péché en particulier mais du péché en général. Imprimons bien cela dans nos cœurs ! Depuis Gn 3 nous savons que le monde a été détraqué par le péché et des événements malheureux arriveront à tous quel que soit leur mode de vie ! Tout ce que Dieu avait créé était bon. Dieu n’a pas créé, ni voulu la souffrance. Mais du fait de la rébellion de l’homme qui a voulu s’affranchir de Dieu et être son propre maître, il connait maladie, mort, désastres, corruption, etc. Depuis ce temps, le mal prédomine mais ce n’était pas comme cela que Dieu avait prévu les choses.
L’histoire de Job caractérise bien cette double façon de concevoir et gérer nos malheurs. Job crie sa colère à Dieu et dit « j’ai eu une vie juste, il n’y a aucune raison que je vive cela ». Et ces amis eux répondent par la voie de culpabilité « s’il t’arrive cela c’est que tu as fait quelque chose de faux ; regarde, tout va bien pour nous ». Mais à la fin Dieu balaie les deux approches. A Job il dit : « ne dites jamais que vous ne méritez pas la souffrance ». Si rien ne fonctionne correctement c’est à cause de notre rébellion. A ses amis qui disent qu’il est un pécheur la bible rappelle que Dieu ne nous rétribue pas selon nos péchés. Sinon il ne resterait plus personne sur cette terre ! Le chrétien sait avec Rm 8,1 : « il n’y a pas de condamnation pour ceux qui sont en Jésus-Christ ». Si Jésus est mort à cause de mon péché, pourquoi faudrait-il encore me punir !?
- L’enseignement que je peux tirer du malheur
Il est aveugle non pas à cause de, mais de sorte que. Cela signifie qu’il y a une intention. Ce qui m’arrive n’est pas pour rien. Toute souffrance n’est jamais totalement absurde. Toute souffrance est dirigée, maitrisée, contrôlée, canalisée par la volonté de Dieu. Dieu hait la souffrance. Je sais qu’il a fait quelque chose pour l’éradiquer définitivement un jour. Mais aujourd’hui Dieu a son agenda et il est plein d’amour. Souvenez-vous de la vie de Joseph. Tout paraissait absurde dans sa vie mais Dieu contrôlait toute chose. Au final cela a permis de sauver sa famille de la famine. Le mal fait par ses frères, Dieu l’a transformé en bien.
A travers cette souffrance c’est l’œuvre de salut, de rédemption de Dieu qui va donc se manifester dans sa vie. « Rédemption » signifie le paiement d’une rançon pour libérer un esclave. Nous étions dans les chaines qui nous empêchent d’être libres (à cause du péché). Ce qui a plongé cet homme dans les ténèbres, Jésus va l’en libérer afin que chacun voie la gloire de Dieu dans la face du Christ et que les témoins de cette scène puissent se tourner vers la lumière du monde. Jésus veut manifester cette œuvre de libération dans nos vies : corps, âme et esprit. Certes, la guérison des corps est un signe de l’œuvre de salut accomplie par Jésus. Mais je crois que ça va plus loin que cela !
Il veut aussi me montrer que c’est dans la souffrance que je commence vraiment à voir les choses qui m’enchainent. En effet la souffrance est une façon pour Dieu d’accomplir son œuvre de libération dans notre vie. La souffrance met en relief tout ce sur quoi j’ai construit ma vie, que j’ai mis au-dessus de Dieu, que je pensais solide mais qui est soudainement mis en péril. Vous êtes sportif de haut niveau et vous finissez paralysé ; vous possédez une entreprise et la crise survient ; vous êtes une famille et l’inacceptable arrive ; etc.
Si je désire que l’œuvre de Dieu s’accomplisse dans ma vie je dois dans mon malheur changer de questionnement et passer de « POURQUOI je souffre » à « pourquoi JE souffre ». Pourquoi est-ce si dur pour moi de vivre cela ? En fait, la souffrance va mettre en lumière ce qui était le plus important pour vous. Nous souffrons plus quand nous perdons ce que nous aimions par-dessus-tout. En le perdant vous pensez que c’est votre vie tout entière qui part en morceaux. Question : de quoi suis-je esclave ? De mon travail, mon corps, mes biens, mes relations,… ? Et est-ce si cruel de la part de Dieu de venir nous révéler cela ? Non ! Car tout ce sur quoi nous construisons notre vie en dehors de Dieu n’est que château de sable. Et comme dit la parabole la marée arrivera… Se posera la question : Dieu aura-t-il été, est-il le roc sur lequel il m’invite à construire ma vie ?
- L’œuvre de Christ pour moi et en moi
Comment l’œuvre de Dieu se manifeste dans ma vie ? Quand nous traversons la souffrance non avec colère et culpabilité mais en nous disant « je veux apprendre de ce malheur, je veux devenir comme Christ au travers de lui, je traverserai cette épreuve en lui faisant confiance et dans l’obéissance ». L’aveugle n’a pas été guéri tout de suite. Parfois, la seule façon de gérer la souffrance c’est simplement d’obéir alors qu’il fait encore noir. Mais en Jésus nous avons un exemple. Lui qui ne méritait rien de ce qu’il a subi, il a dit : « non pas ma volonté mais la tienne ». Il a affronté la souffrance dans l’obéissance et cette souffrance est devenue la manifestation ultime de l’œuvre de Dieu.
En acceptant ce que Jésus a fait pour nous il y a une issue. Quand je regarde la croix, je me souviens : dans sa défaite il y a ma victoire, dans sa souffrance il y a ma guérison, dans ses liens il y a ma liberté, dans sa mort il y a ma vie. Parce que Jésus a souffert pour moi, par conséquent je n’ai pas à être dans le déni parce que je sais que c’est réel. Je n’ai pas à me sentir coupable parce qu’il a tout payé pour moi. Je n’ai pas à être en colère parce qu’il m’enseigne au travers de la souffrance. C’est au travers de sa souffrance que Jésus nous a délivrés de l’esclavage. Libéré de ces deux fausses attitudes, je deviens une personne plus compatissante et attentive aux personnes en souffrance. Quand vous leur parlerez ils sentiront votre amour pour eux. Ils ne sentiront chez vous ni colère ni culpabilité. Vous serez pour eux un encouragement à ne céder ni à l’une ni à l’autre attitude et serez ainsi témoin de l’œuvre de libération de Christ dans vos vies.
Prière : Père, je ne saisis pas tout mais dans ce qui m’arrive je désire apprendre de toi. Viens accomplir en moi ton œuvre de libération, aide-moi à ôter de ma vie ces choses qui sont devenues trop importantes pour moi, à te remettre au centre de ma vie et à te faire confiance. C’est sur toi que je veux construire ma vie. Amen
Pour aller plus loin
- Quelle est ta réaction devant la souffrance : colère ? culpabilité ? autre ?
- (Si) tu souffres : Dieu a-t-il mis ou veut-il mettre le doigt sur quelque chose auquel tu accordais beaucoup d’importance et dont tu étais esclave ?
- En quoi tes souffrances passées ont été une aide pour les autres ? Cela les a-t-il aidés à dépasser colère/culpabilité ?
- Quelle image de Dieu avais-tu ? Ce message a-t-il changé ton image de Dieu ?
- Confiance et obéissance dans le noir : en quoi ces attitudes peuvent nous aider ?