Prédication sur  Mt 7.7-11 / 6,9-10 et 1Pi 5.6-8 et Mt 23.13.

D’une prière nombriliste à une prière orientée sur le Règne de Dieu

 

Bien-aimés du Christ,

S’il est une question qui revient invariablement au catéchisme, c’est bien celle-ci : Si Dieu écoute nos prières, pourquoi ne répond-il pas ? Que veulent dire les jeunes par là ? Que veut-on dire quand on reproche à Dieu de ne pas répondre aux prières ? Ce qui remet en question la promesse de Jésus dans Mattieu 7 : 7 Demandez et vous recevrez ; cherchez et vous trouverez ; frappez et l’on vous ouvrira la porte. (…). 11 Si donc, tout mauvais que vous êtes, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, à combien plus forte raison votre Père céleste donnera-t-il de bonnes choses à ceux qui les lui demandent! ?

En fait, quand Dieu ne répond pas, serait-ce plutôt qu’il ne répond pas comme je veux et quand je veux, qu’il ne me donne pas ce que j’ai demandé, qu’il n’a pas fait ce que je lui ai demandé et dans le délai que je lui ai imparti ? Qu’il n’a pas réagi selon mes attentes ?

Un théologien demandait : Sincèrement, si vous considérez attentivement votre vie de prière, quel est le moteur de votre prière ? Honnêtement… n’est-ce pas nos soucis, nos inquiétudes, nos peurs, nos demandes, ce que nous pensons être nos besoins ? Seigneur, fais que… S’il te plaît permet que… Seigneur, donne, guérit, aide, fortifie, etc. Le commentaire de ce collègue m’a pas mal secoué et m’a poussé à repenser à ma prière. J’aimerais partager avec vous ce qui m’a touché.

Avant d’aller plus loin, j’aimerais juste préciser que l’enseignement de la Bible sur la prière est vaste, il est multi-facettes. Ça signifie que je ne peux pas isoler ces différents aspects les uns des autres, que pour avoir une vie de prière saine, je dois la construire sur tous les aspects que la Bible aborde. Donc ce matin, je ne m’arrêterai qu’à une facette de l’enseignement biblique sur la prière.

Si je reviens aux paroles de Jésus dans Mt 7, je dois me souvenir qu’elles se trouvent dans le SM et qu’au chapitre 6 Jésus a enseigné comment prier avec le Notre Père : Notre Père qui est aux cieux, que ton nom soit sanctifié, que ton règne vienne… que ta volonté soit faite. D’ailleurs, Luc précise que ces bonnes choses que Dieu promet de nous donner, c’est son Esprit Saint, son Esprit Saint qui veut nous transformer[1].

Demandez et vous recevrez… Oui, si je demande sa volonté. Cherchez et vous trouverez Oui, si je cherche d’abord le Règne de Dieu (6,33). Frappez et on vous ouvrira… Ça m’a rappelé une autre parole de Jésus où il dit: Je me tiens à la porte et je frappe. Si quelqu’un entend ma voix et ouvre la porte, j’entrerai chez lui, je souperai avec lui et lui avec moi. Frappez et on vous ouvrira… Oui, si je cherche d’abord une rencontre avec le Christ Jésus.

Ça pose la question : qu’est-ce que je vise dans ma prière ?

Pourtant, Jésus nous encourage à présenter à Dieu nos demandes, y compris nos besoins basiques comme le pain de ce jour. Jésus le sait bien : notre vie de prière nait de notre ancrage dans le concret de la vie. Mais il nous demande de faire une place à son Règne au sein de nos demandes, c-à-d d’être conscients que le souci 1er du Seigneur est de favoriser son Règne[2]. Dans sa grande bonté, il écoute nos demandes et y répond plus souvent que nous pensons, et parfois même sans que nous ayons prié pour car Il nous aime et s’importe avec nous. Mais, il souhaite que notre prière soit orientée, non pas vers ce que nous croyons être nos besoins ou affirmons être nos besoins – car Lui il connaît nos véritables besoins – mais qu’elle soit orientée sur son Règne, disposée à accueillir son Règne. Un exemple de cela est cette prière célèbre :

J’avais demandé à Dieu la force pour atteindre le succès,

          il m’a rendu faible afin que j’apprenne humblement à obéir.

Je lui avais demandé la santé pour faire de grandes choses,

          il m’a donné l’infirmité pour que je fasse des choses meilleures.

J’avais demandé le pouvoir pour être apprécié des hommes,

          il m’a donné la faiblesse afin que j’éprouve le besoin de Dieu.

J’avais demandé un compagnon afin de ne pas vivre seul,

          il m’a donné un cœur afin que je puisse aimer tous mes frères.

J’avais demandé des choses qui puissent réjouir ma vie,

          j’ai reçu la vie afin que je puisse me réjouir de toutes choses.

Je n’ai rien eu de ce que j’avais demandé

          mais j’ai reçu tout ce que j’avais espéré[3].

Je vais prier pour mes demandes et ce que je crois être mes besoins ou ceux des personnes pour qui j’intercède, mais avec le souci du Règne de Dieu et non du règne de mes demandes. Allons encore un pas plus loin.

Je me souviens d’une critique que Jésus adressa aux religieux : Quel malheur pour vous, scribes et pharisiens, hypocrites ! Vous fermez aux gens le royaume des cieux ; vous n’y entrez pas vous–mêmes, et vous n’y laissez pas entrer ceux qui le voudraient (Mt 23,13). Quand Jésus m’invite à prier Que ton Règne vienne… est-ce que ça voudrait dire que je demande au Seigneur de m’aider à ne pas faire obstacle à son Règne, à être une personne qui coopère avec son Règne, qui le facilite ; que je demande au Seigneur, en tout 1er, à ne pas faire obstacle au Règne de Dieu, à ce que Dieu veut faire, donner et être, dans ma vie, dans celle des autres. C’est aussi tout le sens de la prière de Jésus à Gethsémané, la seule prière que nous le voyons faire pour lui-même : voici Père ma demande, que cette coupe s’éloigne de moi, mais pas ma volonté, mais la tienne, sous-entendu, je ne veux pas faire obstacle à ton règne, à ce que tu veux réaliser.

Je repensais à mon rôle de père, de mari, de fils et de pasteur. J’ai mes prières et demandes dans chacun de ces domaines, pour ce que je crois être des besoins. Mais prier pour que je ne sois pas un obstacle à l’avancée du Règne de Dieu, que j’en sois un agent facilitateur dans les mains du St. Esprit ouvre une nouvelle dimension à ma prière. Ça la réoriente. Et surtout… ça ouvre un chemin pour que Dieu me travaille. Jésus a mis les points sur les i dès le début du SM : Heureux ceux qui se savent pauvres en eux-mêmes, car le Règne de Dieu est à eux (5,3). C’est là la condition pour que Dieu puisse te travailler en vue de son règne.

Souvent nous prions pour que Dieu change nos circonstances, qu’il les améliore, les facilite ; ou nous prions pour que Dieu intervienne dans la vie de nos enfants, de notre conjoint, de nos collègues, etc. avec l’idée qu’il les change… Et si notre souci était plutôt de demander au Seigneur de nous garder de faire obstacle à son Règne dans ces circonstances et ces vies. Seigneur, tu connais mes demandes, tu connais ces situations, que ton Règne vienne et ta volonté soit faite… et montre-moi si j’y fais obstacle.

Alors oui, nous sommes invités à nous décharger sur Dieu de nos soucis, avec cette confiance qu’il prend soin de nous, qu’il s’importe avec nous ; à nous décharger sur lui de nos soucis pour trouver la paix et… la liberté de le laisser ensuite nous façonner pour être les facilitateurs de son Règne.

Je conclus avec cette pensée qui m’a traversé l’esprit : la prière à laquelle Dieu se plaît de répondre, c’est la prière qui répond à sa prière à Lui quand il nous dit : je frappe à votre porte… si vous m’écoutez et ouvrez, j’entrerai, et avec moi mon règne entrera.

Amen.

 

[1] Cf. Luc 11,13 et Ga 5,22. Le St.Esprit est donné pour produire en nous le Règne de Dieu.

[2] Voir aussi : Jean Ansaldi, Le combat de la prière, éd. du Moulin, Poliez-le-Grand, 2001, p.26.

[3] Tiré de Le Heurtoir, éd. Ouvertures.

Inscrivez-vous à notre bulletin d'information

Vous recevrez par mail les informations utiles et importantes de notre paroisse, ainsi que des messages de la part de nos pasteurs (prières, méditations, ...)

Votre inscription nous est bien parvenue. A bientôt !