Prédication sur Jean 10,9

La porte communicante entre intériorité et engagement extérieur.

Bien-aimés du Christ,

Les parents de Tessa me disaient : Pour nous baptiser notre enfant c’est lui ouvrir une porte sur un chemin, et l’y accompagner si nécessaire. Ouvrir une porte sur un chemin que Tessa devra, elle, un jour, choisir de parcourir.

Jésus dit : Je suis la porte des brebis.

La porte c’est une image riche de symboles.

Une porte c’est quoi ? C’est un lieu de passage. Un lieu où il faut marquer un arrêt pour passer. Je vous concède qu’aujourd’hui c’est moins évident… avec toutes ces portes automatiques.

La porte c’est le passage entre le dehors et le dedans, entre chez soi et la rue ; entre notre intérieur, là où on se sent bien, à l’abri des regards, là où on se repose, où on se ressource ET le monde ouvert sur l’extérieur où on donne de soi, où on travaille, où on rencontre, où on doit se contenir pour faire bonne figure et rester digne… ; entre la sécurité et là où l’on se risque.

La porte est un symbole de liberté et de sécurité. Elle est lieu d’accueil et de rencontre.

La porte nous ouvre soit vers l’intérieur soit vers l’extérieur. Elle est faite pour être franchie. Je ne peux pas vivre que dedans et je ne peux pas vivre que dehors. Nous avons besoin de racines et d’ailes, d’ancrage et d’ouverture. Un écrivain brésilien raconte cette parabole[1] :

Un commerçant envoya son fils apprendre le secret du bonheur auprès d’un grand Sage.

Le jeune homme marcha 40 jours dans le désert avant d’arriver finalement devant un beau château, au sommet d’une montagne. C’est là que vivait le Sage dont il était en quête.

 Le Sage écouta attentivement le jeune homme lui expliquer le motif de sa visite, mais lui dit qu’il n’avait pas alors le temps de lui révéler le secret du bonheur.

Il lui suggéra de faire un tour de promenade dans le palais et de revenir le voir dans deux heures.

« Cependant, je veux vous demander une faveur », ajouta le Sage en remettant au jeune homme une petite cuiller dans laquelle il versa 2 gouttes d’huile : « Tout au long de votre promenade, tenez cette cuiller à la main, en faisant en sorte de ne pas renverser l’huile.»

Le jeune homme commença à monter et descendre les escaliers du palais, en gardant toujours les yeux fixés sur la cuiller. Au bout de deux heures, il revint en présence du Sage.

 « Alors, demanda celui-ci, avez-vous vu les tapisseries de Perse qui se trouvent dans ma salle à manger ? Avez-vous vu le parc que le Maître des Jardiniers a mis dix ans à créer ? Avez-vous remarqué les beaux parchemins de ma bibliothèque ? »

Le jeune homme, confus, dut avouer qu’il n’avait rien vu du tout. Son seul souci avait été de ne point renverser les gouttes d’huile que le Sage lui avait confiées.

 « Eh bien, retourne faire connaissance des merveilles de mon univers, lui dit le Sage. On ne peut se fier à un homme si l’on ne connaît par la maison qu’il habite. »

 Plus rassuré maintenant, le jeune homme prit la cuiller et retourna se promener dans le palais, en prêtant attention, cette fois, à toutes les œuvres d’art qui étaient accrochées aux murs et aux plafonds. Il vit les jardins, les montagnes alentour, la délicatesse des fleurs, le raffinement avec lequel chacune des œuvres d’art était disposée à la place qui convenait. De retour auprès du Sage, il relata de façon détaillée tout ce qu’il avait vu.

 « Mais où sont les deux gouttes d’huile que je t’avais confiées ? »

 Le jeune homme, regardant alors la cuiller, constata qu’il les avait renversées.

 « Eh bien, dit alors le Sage des Sages, c’est là le seul conseil que j’aie à te donner : le secret du bonheur est de regarder toutes les merveilles du monde, mais sans jamais oublier les deux gouttes d’huile dans la cuiller. »

On pourrait se demander que représentent ces 2 gouttes d’huile…

En Jésus, Dieu me montre son amour infaillible. Baptiser son enfant, on l’a vu dans nos préparations, c’est l’ancrer dans l’amour que Dieu a pour lui, dans ce désir que Dieu a de faire de nous ses enfants adoptifs. En discutant, nous avons vu que des parents qui adoptent un enfant ne le font pas à priori pas pour perpétuer la race, mais ils le font parce qu’ils ont envie de donner de l’amour à cet enfant. Et bien Jésus nous montre cela : Dieu veut nous adopter comme ses enfants parce qu’il veut nous aimer. Etre baptisé, et ça, ça nous concerne nous les baptisés, c’est être ancré dans cet amour formidable que le Seigneur a pour nous, lui qui de Créateur s’est fait créature pour nous le dire, lui qui d’Eternel s’est fait mortel pour nous rejoindre, lui qui de Tout-puissant et Tout-suffisant s’est fait petit parmi les petits pour entrer en relation avec nous, Lui Dieu qui se laisse crucifié par amour pour nous dire son pardon et sa bienveillance.

Jésus est la porte, car par lui j’ai accès à l’amour de Dieu pour moi.

Jésus est la porte, car par lui Dieu vient à la rencontre de ce monde et nous envoie à la rencontre de ce monde.

Par lui je suis enraciné en l’amour de Dieu et avec lui j’ai des ailes pour aller dans ce monde, en témoin de son amour pour faire la différence.

L’amour que Jésus nous révèle et nous donne serait-ce l’huile dans la cuillère ?

La grande question pour nous qui vivons dans ce monde est : avons-nous le souci de soigner notre ancrage dans l’amour que Jésus nous a montré ? Avons-nous le souci de soigner notre relation au Seigneur qui fait de nous ses enfants adoptifs ? Et si nous la soignons, avons-nous le souci et l’envie de sortir dans ce monde pour le rendre meilleur ?

Etre baptisé c’est, entre autres, être invité à prendre le chemin me conduisant au source de l’amour de Dieu pour nous afin de mieux pouvoir nous mouvoir dans ce monde qui tend à nous disperser et à nous balloter dans tous les sens. La Bible et Jésus ne nous encouragent pas à nous retirer du monde et de ses affaires, mais à nous ancrer en l’amour de Dieu et en sa Parole pour pouvoir mieux être debout dans ce monde et assumer notre rôle d’acteur sans pour autant être hypnotisé par les valeurs de ce monde.

Soigner notre ancrage en Christ implique oser le recul, le silence, la prière nourrie de la méditation de l’Evangile. Soigner ma relation à Jésus ce n’est pas de bondieuserie ou de la bigoterie, c’est une responsabilité vitale. Je lisais un article disant que, selon le psychiatre suisse Daniel Hell, l’augmentation des cas de dépression est lié l’absence de racines solides[2].

Interrogeons-nous :

  • Quelle place pour l’intériorité dans notre vie, pour le ressourcement ?
  • Comme chrétien baptisé, quelle place dans ma vie pour prendre soin de ma vie spirituelle, de mon ancrage en l’amour de Dieu pour moi ?

Interrogeons-nous aussi dans l’autre sens :

  • Comme chrétien, dans quelle mesure, ma foi, ma spiritualité m’encourage-t-elle à prendre et occuper ma place dans ce monde pour le rendre meilleur ?

Jésus est la porte.    Ouvrir la porte c’est une action délibérée, la fermer aussi d’ailleurs. Franchir la porte est une action délibérée.

Jésus dit qu’il est la porte parce que dans son amour il me laisse libre, libre pour mettre l’accent sur l’intériorité ou l’extériorité, mais lui me montre la voie : s’ancrer en l’amour de Dieu pour m’investir dans ce monde sans y perdre mon âme.

Amen.

 

 

[1] Paulo Coelho cité par Jean Vernette et Claire Moncelon, Parabole pour le chemin, Presse de la Renaissance, Paris, 2000, p.26-27.

[2] Anselm Grün, Des racines et des ailes, article paru dans le magazine PRIER, n°453, juillet-aout 2023, p.39-41.

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