Maturité : ce qu’elle est 2/2 (Luc 18,9-14 ; Philippiens 2,1-11)

Chers amis depuis la semaine dernière nous méditons sur la question de la maturité et de l’importance de développer des relations vraies avec Dieu avec soi et avec les autres (voir prédication sur le site). Maturité = aimer et être en relation avec les autres de la bonne manière. Passer de l’état d’enfant à celui d’adulte autant spirituellement qu’émotionnellement.   Je vais lire cette parabole sous l’angle de la question de la maturité.

  1. La fausse maturité

La parabole met en scène un pharisien, chef religieux juif et un publicain, un collecteur d’impôts au service des romains (collabo) considéré comme un pécheur. De l’extérieur, on pourrait considérer ce pharisien comme étant quelqu’un de mature. Il semble plutôt sûr de lui-même, il est fidèle et discipliné dans sa pratique religieuse (prière, jeûne et dime), extrêmement scrupuleux de la loi et de la pureté rituelle ; il semble être quelqu’un d’irréprochable…

De même en milieu chrétien nous pourrions considérer une personne mature parce qu’elle a l’habitude d’étudier la Bible et connait très bien sa Bible ; elle est active dans l’église, elle témoigne de sa foi, elle a une vie très disciplinée, elle consacre du temps à la prière, elle est généreuse, elle fait ce qu’elle doit et elle évite ce qui est proscrit, etc.

La maturité est souvent et faussement définie en termes de connaissances acquises (elle a fait des études, donc elle est mature…), d’habitudes et comportements acceptables (elle se tient bien en société), de compétences ou d’activités bien choisies (il parle bien et donne de bons messages). Tous ces aspects-là ne fondent pas la maturité. Car vous pouvez à côté de cela être en totale incapacité d’aimer et d’entrer en relation avec les autres d’une façon adéquate. Car c’est dans la manière dont les gens nouent des relations les uns avec les autres que la maturité s’observe le mieux. Et ici dans la façon dont ils se regardent eux-mêmes et regardent autrui.

  1. Signes d’immaturité : que fait ce pharisien ?

Le pharisien n’a donc ici que l’apparence de la maturité. Comme on dit l’habit ne fait pas le moine. Jésus nous met en garde ici contre toutes les personnes qui se croient justes et qui méprisent les autres. Regardons ce que fait le pharisien et ce qui fausse nos relations, ce qui nous empêche d’entrer en relation juste tant avec Dieu qu’avec les autres.

Je citerais 3 choses. D’abord il se met en avant, il a besoin de se faire valoir, de se faire remarquer. 5 fois en 2 versets il parle en « je ». Ce n’est plus Dieu le sujet de sa prière, mais il devient lui-même sujet central de sa prière. Il ne remercie pas Dieu pour qui Il est mais pour ce qu’il fait ou ne fait pas, lui ! Regarde ma vie vertueuse Dieu, sous-entendu : j’ai droit à très faveurs ! Il est donc très satisfait de lui-même. Il se glorifie de sa pratique religieuse. « Je fais les choses comme il faut donc je dois être regardé comme quelqu’un de bien ».

Ensuite il se compare aux autres. « Merci que je ne suis pas comme lui ». Le pharisien se permet de casser du sucre sur le dos du pécheur pour paraitre meilleur… Il évoque ce qu’il sait bien faire pour parler en mal de ceux qui font moins et moins bien. Car c’est un fait que parfois nous cherchons à nous grandir en rabaissant les autres. Être quelqu’un au détriment des autres. Quand nous souhaitons nous grandir c’est qu’il y a quelque chose en nous qui nous dit que nous sommes trop petits. Cela nous aide peut-être à nous paraître moins petit mais nos relations n’en sortent pas grandies !  « Comparé à lui je suis plus ceci, comparé à elle je suis moins cela ! ». Comparé à Jésus, vous êtes comment ?

Fort symptôme d’une spiritualité émotionnellement malsaine : juger le cheminement spirituel des autres personnes. C’est exactement ce que fait le pharisien. Un père du désert a écrit « si quelqu’un porte ses propres péchés, il ne voit pas ceux de son prochain ». Le pharisien ne porte pas ses propres péchés. Il est plus facile de voir le péché des autres que le nôtre. « Je ne suis pas comme ce pécheur » : nous tournons souvent nos différences en supériorité morale ou en vertus. Le danger est de catégoriser entre les bons, ceux de l’intérieur (pharisiens) et les mauvais, ceux de l’extérieur, les pécheurs.

Jésus dénonce ici notre orgueil dont on sait qu’il tue les relations. Avoir une opinion exagérée de sa valeur personnelle et de son importance se fait généralement aux dépens de la considération qui est dû aux autres. L’orgueil est une sorte d’hypertrophie du moi (inconsciente). Une sorte d’enflure du cœur par laquelle l’homme s’étend et se grossit, une sorte de grenouille qui voudrait se faire aussi grosse qu’un bœuf ! Dans la bible cela se manifeste par le désir d’être honoré devant les hommes, agir pour être vu des hommes, faire son propre éloge même par le biais de la prière, se demander qui est le plus grand, etc. (= amour propre, arrogance, prétention).

Que démontre cette attitude ? Pourquoi agissons-nous comme cela ? L’orgueil est une des nombreuses réactions pécheresse qu’on utilise pour se protéger. Car il y a en nous une grande insécurité qui provient de notre séparation d’avec Dieu que nous essayons de combler au travers de ce que je fais, réussites, compétences, vertus, etc. Nous mettons tout cela en avant pour masquer en fait un grand vide en nous, cette peur notamment de ne pas exister pour les autres et pour Dieu. Mais le souci c’est que ces façons d’être portent atteinte à nos relations avec les autres et en particulier avec nos proches. Elles démontrent que nous n’avons pas un regard juste sur nous-mêmes, sur Dieu et les autres. Le défi est d’accepter un autre regard sur nous-mêmes.

  1. Signe et début de la maturité

Le publicain a un tout autre regard sur lui et une autre façon d’approcher Dieu. L’humilité caractérise son attitude.  Il a conscience d’être parfaitement imparfaits devant Dieu.  Avec humilité, il reconnait sa faiblesse, son insuffisance et cela le pousse à s’abaisser volontairement. La maturité est moins une question de perfection qu’une prise de consciente croissante de notre imperfection. Le publicain a une forte conscience de son péché, c.-à-d. de son décalage d’avec la volonté de Dieu (et séparation d’avec Dieu).

Ce que fait ce publicain devant Dieu est le début de possibles relations vraies avec Dieu, soi et autrui. Vous savez comment cela s’appelle ce qu’il fait ? Il fait preuve d’une grande vulnérabilité devant Dieu.  Le grand courage ici, c’est qu’il se met à nu devant Dieu. Il comprend qu’il n’a rien à faire valoir devant Dieu. Qu’il ne peut se prévaloir de quoi que ce soit devant Dieu contrairement au pharisien. Il ne se cache derrière rien… Il pourrait très bien essayer de se justifier, de minimiser ou de jouer sur la pitié de soi. Ce qui serait une autre façon de se protéger et de ne pas affronter ce qu’il est ou n’est pas devant Dieu.

Alors que le pharisien ne regarde qu’à lui-même, s’appuie sur ses propres mérites et regarde de haut le publicain, le publicain s’abaisse et se met sous le regard de Dieu et reconnait sa totale dépendance de lui et son besoin de lui. Aie pitié de moi, pauvre pécheur. Voilà tel que je suis devant toi. Voilà mon cœur. Je n’ai rien à moi. Le commencement de la maturité spirituelle, c’est admettre notre pauvreté et oser s’affranchir de ses systèmes de défense avec le but d’être toujours plus vrai avec Dieu soi-même et les autres.  Oui, cela demande du courage.

L’orgueil nous aveugle sur notre vraie condition devant Dieu. Mais l’humilité jette un regard lucide sur notre condition. Elle n’oublie jamais que le standard de comparaison ultime c’est le caractère de Dieu lui-même. Et force est de constater que nous sommes bien en deçà…

Jésus termine cette parabole en disant « toute personne qui s’élève sera abaissée et celles qui s’abaisse sera élevée ».  Nous sommes face à un double choix dans nos relations : soit je m’impose moi-même soit je m’humilie moi-même.  Dieu voit les cœurs humbles, qui dépendent de Lui, de sa grâce et de son amour. Et il les élève avec honneur.

Dernière chose : un cantique dit « Jésus, je suis devant ta croix ; j’y vois tout ton amour pour moi. Voici mon cœur je viens vers toi Seigneur ». Plus je regarde à la croix plus j’ai conscience de mon imperfection. Plus je regarde la croix et plus je suis invité à dépendre complètement du Christ.

Jésus s’est humilié jusqu’à mourir sur la croix. Pourquoi ? Pour que nous n’ayons plus à faire semblant. Pour que nous n’ayons plus à nous justifier. Pour que nous ne cherchions plus à être qqun.

Parce que nous sommes déjà à ses yeux qqun, et mieux, nous sommes ses enfants. Nous n’avons pas besoin d’être admirés. Nous sommes déjà aimés de Dieu. Tels que nous sommes. Comme le publicain, tu peux t’approcher de Dieu, tel un enfant, sans far, simplement, non pas sur la base de tes mérites car tu n’en as pas. C’est bien pour cela que Jésus est mort pour toi !  Tu peux donc vivre et te reposer sur la base de la réalité de la grâce abondante et de l’amour parfait manifesté en Jésus-Christ.

Concluons : comprenons bien ceci : cette façon courageuse de s’approcher de Dieu changera radicalement la dynamique de la façon dont nous voyons Dieu, dont nous nous voyons nous-mêmes et dont nous voyons les autres… Plus nous nous comprenons nous-mêmes comme au bénéfice de sa grâce, plus cela nourrit notre compassion envers nos frères et sœurs. Regarde-les d’ailleurs : comme lui, comme elle, tu es enfant bien aimé avec le même besoin de grâce, d’amour et de pardon. Tu comprends certainement ce que cela signifie et implique désormais !? Amen

Pour aller plus loin :  Si nous avons tous ce même besoin, qu’est-ce que cela implique (pour moi, dans mon regard sur autrui, mes relations) ? Ou encore : en quoi le juste regard du publicain sur lui-même changer la dynamique des relations aux autres ?  Pourquoi est-ce difficile de se rendre vulnérable ? Quel moyen j’utilise (pour me protéger) par peur de ne pas exister ou être qqun pour les autres ?

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