Prédication bulle le 7 mai 2017 : les uns les autres ou la communion fraternelle en jeu

Textes : Rm 13,8 ; 1 Jean 4,7-11 ; 1 Co 13,4-8 ; Jn 13,33-35

Chers amis, s’il y a une chose que je trouve important de vivre et développer dans une église c’est bien la communion fraternelle à partir de relations vraies, authentiques, fécondes et surtout pleines d’amour.  Notre monde a soif d’amour et de relations vraies et l’église peut être ce lieu où cela se vit. Dans la réalité ce n’est pas toujours si simple ! Vivre avec les autres n’est pas toujours facile même entre chrétiens ! Nous sommes différents et par nature nous avons tendance à penser d’abord à nous-mêmes et à nos intérêts personnels. Même l’Eglise dans ses débuts a dû gérer des conflits, des tensions, des dissensions d’ordre personnel ou communautaire (Ac 6,1).

  1. L’expression « les uns les autres » pilier de la communion fraternelle

La foi chrétienne se vit dans une double dimension : verticale (notre relation avec le Seigneur) et horizontale (notre relation les uns avec les autres). Dieu nous aime et nous a réconcilié avec lui par le Christ et nous avons la responsabilité de maintenir vivante cette relation verticale avec le seigneur. Nous sommes invités à nous aimer les uns les autres comme il nous a aimés. « Car si nous nous aimons les uns les autres, Dieu demeure en nous et son amour se manifeste parfaitement en nous » (1 Jn 4,12).

Le NT utilise beaucoup l’expression « les uns les autres ». Ce mot grec revient 100 fois dans le NT. Il est composé de deux mots identiques accolés (les uns les uns). La parole indique ainsi à quel point il est important de prendre soin de l’aspect relationnel de la vie du croyant. Une trentaine de verbes à l’impératif sont utilisés avec cette expression notamment « aimez-vous les uns les autres » qui revient 16 fois. Mais nous trouvons aussi : priez les uns pour les autres, consolez-vous les uns les autres, vivez en paix les uns avec les autres, ou encore estimez-vous, honorez-vous, veillez sur, supportez-vous, édifiez-vous, accueillez-vous, exhortez-vous, etc.

Ces verbes sont à la fois un appel et une promesse. Un appel : des impératifs s’adressent donc à notre volonté ; nous avons quelque chose à faire pour maintenir ou rétablir l’harmonie dans l’église : « efforcez-vous de conserver l’unité » dira Paul. Cela montre que la chose n’est pas naturelle au cœur de l’homme ! Une promesse: Dieu nous a accordé son esprit qui nous rend capable d’accomplir sa volonté. Son esprit en nous peut et veut reproduire entre nous ces relations nouvelles des uns avec les autres. Tous ces commandements brossent un tableau assez complet de ce que Dieu nous demande pour que notre vie commune soit harmonieuse et le glorifie.

  1. Voyons les différentes leçons de l’expression « les uns les autres ».

 A. Tous les commandements liés à cette expression sont de simples variantes du plus fréquent d’entre eux : aimez-vous les uns les autres

L’amour mutuel est LE commandement auquel Dieu attache de l’importance. Ce n’est pas une option facultative du disciple mais bien la marque du chrétien. « Aimez-vous les uns les autres ; c’est à ceci que tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples ; à l’amour que vous aurez les uns pour les autres ». Le 4/5 des impératifs se rapportent à l’amour mutuel et aux diverses manifestations de l’amour dans la vie en commun. Quant aux autres impératifs que j’ai cités (accueil, estime, vigilance, édification réciproques, etc.) on ne peut en respecter l’esprit que si nous aimons les autres.

Il y a des impératifs positifs et négatifs. Par exemple « ne vous jugez pas les uns les autres » complète « estimez-vous les uns les autres ». Les deux visent à maintenir l’harmonie dans les relations. Ils se complètent et se renforcent mutuellement pour entretenir un climat fraternel sain.  Dans 1 Co 13 Paul décrit l’amour dans ce qu’il est et ce qu’il n’est pas. Dans ce qu’il fait et ce qu’il ne fait pas. Nous savons que les ressentiments, les médisances, l’esprit de jugement sont comme des toxines qui empoisonnent la vie du corps du Christ. Tous ces impératifs sont autant de façons de nous aimer car l’amour s’exprime de façon différente dans une situation différente et un besoin différent.

B. La vie chrétienne se vit au sein d’une communauté.

En 1 Co 12 Paul explique que nous sommes un corps et comme membre du corps nous avons des relations avec les autres membres du corps (Cf. Rm 12,5). L’expression les uns les autres indique que nous ne vivons pas notre foi seuls mais dans le cadre d’une communauté dans laquelle nous partageons entre nous les problèmes et les responsabilités. Et le rôle de l’église et de pouvoir construire des relations suivies où chacun peut s’édifier, se soutenir, servir, s’instruire, etc. La vie dans un corps est un défi mais c’est aussi une bonne école où nous apprenons à travailler en équipe, à valoriser les autres, à grandir ensemble. J’ai besoin des uns pour grandir comme les autres ont besoin de moi pour grandir (complémentarité des dons).

Si jamais vous aviez un doute, ces exhortations s’adressent donc à l’ensemble des chrétiens et pas seulement aux responsables (pasteurs, catéchètes, conseillers, etc.). Chaque personne est invitée à exercer sa responsabilité comme membre du corps et à l’égard des autres membres de ce corps.

Chacun est encouragé à vivre cette communion fraternelle, chacun peut exercer dans l’amour la vigilance, l’écoute, le pardon, l’instruction, la consolation, la prière, l’estime réciproques. Il n’y a pas besoin de diplôme. Cela suppose autre chose, et c’est le dernier point :

C. Les exhortations supposent des relations concrètes et constantes avec les membres de la communauté

Mettre en pratique les impératifs associés à l’expression les uns les autres demande que nous devons aller bien au-delà des relations qu’il est convenu d’entretenir entre bons voisins. L’expression les uns les autres prend tout son sens quand les personnes se connaissent entre elles et entretiennent des relations privilégiées au sein de la communauté. Si je veux exhorter mon frère, il faut que j’apprenne d’abord à le connaître. S’il doit veiller sur moi, je ne puis me retrancher derrière l’excuse « ce sont mes affaires privées ». Prier les uns pour les autres suppose de se faire confiance les uns les autres. Si je veux aimer mes frères et sœurs,  cela suppose que j’apprenne à connaître leurs besoins et leurs problèmes, que je leur consacre du temps, bref qu’il y ait entre nous des relations profondes et non superficielles. D’où le rôle des PGM pour cela ! Nous ne pouvons pas vivre ces impératifs si nous vivons étrangers les uns aux autres. Je ne peux que nous encourager à venir au culte avec l’idée d’approfondir les liens entre nous et pas seulement s’asseoir, chanter, écouter un sermon pour repartir comme si j’étais tout seul, indépendant des autres !

Conclusion : les uns les autres, petite formule mais grand défi pour chacun de nous. Défi que d’apprendre pas à pas à connaître, à accepter et à aimer des personnes différentes de nous. Nous pouvons avoir des divergences de caractère, de tempérament, d’opinions politiques, sociales et ecclésiales, etc. Mais ce cadre restreint qu’est église est un lieu où Dieu nous éduque à entretenir des relations avec nos frères et sœurs puis avec l’ensemble des hommes. Nous sommes ici à l’école des relations, de l’amour et de la confiance. Rien ne se fait sans efforts et encore moins sans l’aide du SE. Laissons le Saint-Esprit nous imprégner de l’amour, de la bonté, de la patience, de la douceur, de l’humilité du Christ. Lui seul fera grandir notre communion fraternelle. Dans un monde qui a soif d’amour et de relations vraies, celle-ci sera un témoignage pour le monde. Ce n’est pas rien !

Prière : Père, tu mets des frères et des sœurs sur mon chemin, merci pour chacun d’eux. Viens ôter toute méfiance à leur égard. Je te prie de m’aider à vivre cette réciprocité qui nait de la confiance et qui fait grandir nos relations. Remplis-moi de ton SE et de l’amour du Christ qui fécondera cette communion fraternelle ici à Bulle. Aide-moi à faire ma part pour que notre vie d’église soit harmonieuse et à ta gloire. Que je n’oublie pas toi tu t’es donné pour nous afin que nous vivions de ton amour.

Pour aller plus loin :

  • Qu’est-ce qui te fais peur dans cette réciprocité/t’empêche de la vivre pleinement ?
  • De quoi avons-nous besoin pour développer une meilleure communion fraternelle ?
  • Pourquoi ne pas construire une relation privilégiée avec un paroissien moins connu?