Prédication de Noël sur Jean 1,1-18 et Héb 1,1-3
Pour que la bonne nouvelle de Noël change quelque chose
Bien-aimés du Christ,
La naissance de Jésus notre Sauveur est-elle encore une bonne nouvelle pour nous à défaut de l’être pour ce monde ? Cela devrait, n’est-ce pas ?
Parce que Jésus est Dieu qui s’est fait homme, comme nous… Il s’est fait homme pour nous dire Dieu, pour le faire vivre devant nous. De même que les notes de musique écrites sur la partition ne signifient rien à moins que le musicien ne les fasse vivre, raisonner et vibrer, de même Jésus est venu pour faire raisonner et vibrer Dieu parmi nous. De même que les lettres alignées sur du papier ne signifient rien à moins d’être prononcées en mots et en phrase, Jésus est venu donner chair à la Parole de Dieu, à Dieu lui-même. La Bible dit qu’il est l’expression de son être, ou l’empreinte de sa substance. Ou comme l’a écrit Varillon : De même que le prisme décompose la lumière blanche en différentes couleurs, Jésus décompose Dieu en actes, paroles, gestes, réflexions humains[1].
Dieu s’incarne en Jésus. Par amour pour toi, pour nous. On a tellement l’habitude de l’entendre, n’est-ce pas… Je lisais ceci : l’amour de Dieu pour nous est le véritable amour car c’est un amour qui nous regarde non pas d’en haut, mais d’en bas[2]. Dieu est venu dans ce monde pour nous regarder d’en bas… pas d’en haut. Pour nous rejoindre, pas pour nous faire la leçon. Pour nous aimer, pas pour nous faire la morale. Pour nous relever, pas pour nous écraser ou nous intimider. Nous aimer en nous regardant d’en haut serait nous dire : Je t’aime… mais sache que je te suis supérieur, que tu me dois l’obéissance. Tout ce que Jésus a été ne correspond pas à ça. Imagine Jésus qui lave les pieds à ses disciples et qui dit ensuite : Qui m’a vu a vu Dieu le Père. Jésus me révèle un Dieu qui nous aime pour de vrai, c’est-à-dire qui nous accueille et se donne à nous, qui t’accueille comme tu es et se donne à toi. Il est Dieu avec nous, Dieu avec toi.
Ça c’est la 1ère partie de la bonne nouvelle de Noël. Parce que sans la 2e partie, la 1ère partie ne change rien et laisse ce monde indifférent, tant il est fatigué de promesses non tenues. Et Jésus, Dieu-avec-nous-qui-sauve est la plus grande promesse de toute l’histoire. Dis-moi : pourquoi Dieu se fait-il homme en Jésus ?
Dieu s’est fait homme en Jésus, il nous a rejoint en lui, pour que nous devenions enfants de Dieu. Nous nous satisfaisons parfois un peu vite de nous dire que nous avons été adoptés par Dieu comme son enfant. L’évangile de Jean est plus fin et il fait raisonner cette promesse avec subtilité : Quelques–uns, cependant, l’ont accueilli, ils ont cru en lui, ils ont placé leur confiance dans ce qu’il était ; à tous ceux–là, il a accordé le privilège de devenir enfants de Dieu. Devenir enfants de Dieu. Devenir c’est un chemin… Devenir c’est une vie… Comme Jésus est Dieu qui devient homme et grandit en homme, de même nous devenons enfants de Dieu et grandissons en tant que tel. Dieu est devenu homme pour nous habiter à notre tour si on l’accueille et lui donne crédit. Il s’est incarné pour nous montrer ce qu’est un homme selon son cœur, et pour s’incarner ensuite en nous par son Esprit Saint. Il veut s’incarner dans tout ton être, dans tout ce que tu es. Et c’est ce qui pourrait révolutionner le monde.
Jésus, Dieu-avec-nous-qui-sauve est le Dieu présent, vivant, aujourd’hui.
Il est avec nous pour être en nous, au travers de nous. Par son St.Esprit, il veut faire avec nous ce que l’orchestre fait avec les notes de la symphonie. Par son St.Esprit, il veut faire de nous ce que le poète fait avec les lettres de l’alphabet. Il veut pénétrer tout notre être. Il veut nous restaurer. Il veut nous sauver de nos péchés ; il est venu nous arracher à nos travers, à nos faux-fuyants, à nos égoïsmes. Il est venu nous arracher à nos peurs qui nous transforme en menaces les uns pour les autres.
De même que Jésus est l’empreinte de la substance de Dieu, de même il veut laisser son empreinte sur nous, en nous, au travers de nous, par l’action de son St.Esprit. Noël ne peut que laisser ce monde indifférent si Jésus ne peut laisser son empreinte dans nos vies et par nous autour de nous.
Nous, chrétiens, avons parfois la prétention d’aimer les autres et en particulier ce monde qui va mal en le regardant d’en haut. Nous devrions aimer le monde en le regardant d’en bas. Comme Dieu l’a fait. Et ce n’est possible qu’en laissant le St.Esprit habiter en nous, se déployer en nous, donner sa tonalité à la partition de notre vie, nous remplir de son amour.
Jésus était plein de grâce et de vérité. Il peut y avoir de la vérité sans grâce, mais la grâce n’existe que reliée à la vérité. Jésus était dans la vérité car il savait qui il était, le Fils de Dieu, Dieu devenu homme. Et il était dans la grâce accompagnant ce monde. Jésus a grandi en obéissant à Marie et Joseph. Jésus a grandi en apprenant de Marie et Joseph. Il a exercé un métier. Il a fréquenté la synagogue. Il a eu des copains. En même temps, il a su affirmé sa différence, sans se couper du monde. Il a par ex. une fois désobéi à Marie et Joseph en fuguant 3 jours et quand ses parents l’ont retrouvé, il leur a dit qu’il devait s’occuper des affaires de son Père, sous-entendu Dieu. Il s’est fait gronder et il a repris le chemin de la maison en étant soumis à ses parents, dit l’évangile. C’est ça être plein de grâce et de vérité. Il a encouragé le bien chez les autres, il a encouragé la volonté et le courage chez les autres. Il a été celui qui permettait aux autres de redécouvrir la mélodie d’une vie en se sachant aimés de Dieu.
Si en Jésus Dieu s’est fait homme, s’est incarné, c’est pour que nous devenions ses enfants, pour pouvoir s’incarné en nous, c’est-à-dire laisser son empreinte sur nous. A propos… quelle empreinte laisse-t-il sur toi ? Et sur nous comme communauté ?
Oui, un Sauveur nous est né… nouvelle de joie… Un Sauveur nous est né… qui nous invite à suivre ses pas… à le laisser écrire une histoire nouvelle avec les lettres de notre vie, à le laisser donner vie à la partition de notre vie.
Amen.
[1] F. Varillon, Jésus, méditations, Bayard, Montrouge, 2018, p.48.
[2] F. Varillon, Joie de croire, joie de vivre, Le centurion, Paris, 1981, p.31.
