Bien-aimés du Christ,
L’autre jour, un catéchumène de 3e année du CO me demandait de faire une leçon sur le thème suivant : Comment prier de façon à sentir la présence de Dieu ? Peut-on seulement provoquer le sentiment de la présence de Dieu ? Je ne suis pas sûr… Mais la question m’a occupé dès lors.
Prier peut être décourageant quand je me sens dans un monologue et que rien ne se passe. Tu voudrais te mettre dans la présence de Dieu pour prier et être à son écoute, être avec Lui, mais tes pensées sont pleines de ton agenda, de tes engagements du jour, ou de soucis personnels ; parfois c’est ton corps et ses douleurs qui viennent interférer dans ta prière, tes problèmes de santé, ta fatigue. Parfois c’est tes responsabilités légitimes : pour le pasteur ce sera son ministère (son service à Dieu – quel paradoxe) ; pour la jeune maman ce sera son attention à son bébé. Je ne sais pas si ça vous est déjà arrivé, mais parfois moi je me lève dépité de ma prière et je la laisse là inachevée en me disant que ça ira mieux demain, n’arrivant pas à me concentrer ce jour-là.
Et voici que le Ps 103 débute par un appel intéressant : Mon âme, bénis l’Eternel… David parle à son âme. Comme pour la prendre par la main et aller à la prière avec elle. Parce que ce n’est pas tous les jours le Nirvana, il faut parfois parler à son âme. David explique ensuite ce qu’il entend par son âme : Tout ce qui est en moi… Ce mot hébreu englobe tout ce qui est de l’ordre de nos émotions et sentiments, ainsi que ce qui est de l’ordre de notre raison analytique, de nos capacités décisionnelles. Et encore notre inconscient. Donc aussi ce qui pourrait résister à la prière[1] : nos doutes, nos colères, nos ressentiments, etc. Ce qui en nous fait que nous ne nous sentons pas digne de prier, voire en décalage complet avec le Seigneur. La petite voix qui t’accuse de ceci ou cela.
David convoque ce qui l’habite pour bénir le Seigneur, avec un impératif. Bénis le Seigneur ! Car ça ne va pas toujours de soi. Et il se peut que ta rencontre avec le Seigneur dans la prière débute par un acte de volonté.
Dans les psaumes, à chaque fois que le psalmiste encourage son âme à bénir Dieu, c’est dans un contexte difficile[2]. Et ici le Ps 102 reflète l’épreuve qu’il traverse. A chaque fois, le sentiment de la présence de Dieu n’est pas là. Mais ça ne fait rien : Mon âme, bénis Son Saint Nom. Le nom en hébreu c’est la personne, c’est tout ce qu’elle représente. Ici c’est Yahwé, Celui qui a fait alliance avec son peuple, Celui qui a libéré son peuple. Celui qui s’est fait homme et a scellé de sa vie sur la Croix son alliance avec nous.
Mais n’allons pas trop vite.
Bénir Dieu c’est dire du bien de lui, c’est lui souhaiter du bien. Souhaiter du bien à Dieu… cela vous semble-t-il saugrenu ?
Je vous raconte une expérience personnelle. Il y a quelque temps, je me suis surpris à débuter ma prière du matin par Bonjour Seigneur. Et la petite voix intérieure me répond : Bonjour Gérard, ça fait longtemps que tu ne t’es pas adressé à moi comme ça. Que veux-tu dire par là ? – Beh, je te souhaite une bonne journée Seigneur. Et puis je me mets à réfléchir : sa journée au Seigneur, ça risque fort de pas être terrible, avec nos guerres, nos méchancetés, nos injustices, nos entêtements à avoir raison et à être les 1ers servis. Et je lui en fais part. Et lui de me dire : Toi, Gérard, si j’ai bien compris, tu aimerais que j’aie une bonne journée, n’est-ce pas ? Je complète ma prière : Seigneur je te souhaite une bonne journée… je souhaite qu’à la fin de la journée tu sois fier de moi comme un papa est fier de son enfant et que je ne t’aie pas trop fait honte durant ce jour ; aide-moi à t’accorder une bonne journée.
Voilà qui nous a donné durant un moment, un instant de présence l’un à l’autre.
Bénir Dieu, lui souhaiter du bien. C’est plus que le louer. C’est regarder dans la même direction que Lui.
Le verbe hébreu traduit par bénir signifie aussi s’agenouiller. Bénir Dieu, lui souhaiter du bien et dire du bien de lui c’est ouvrir la porte au sens de sa grandeur. Dieu est grand. Il est Yahwé, l’Eternel, Seigneur. Quand je le bénis, il m’ouvre à sa grandeur. En par là même cela m’ouvre à la dimension de son service. Cela me sensibilise à le servir.
Bénir le Saint Nom de Dieu serait-ce en fait une autre façon de dire : Que Ton Nom soit sanctifié ? Que ma vie ne soit pas un obstacle sur ton chemin ô Dieu.
La 2e chose que j’aimerais partager avec vous est quelque chose que nous devrions méditer davantage pour assurer notre foi. Nous ne pourrions pas bénir Dieu s’Il ne nous avait pas d’abord bénis. Dans Genèse 1, c’est la 1ère chose qu’il fait avec l’homme : il le bénit, lui souhaite du bien, dit du bien de lui. Il lui fait cette confiance presque déraisonnable de l’établir maître de sa Création. Il répète de nombreuses fois sa bénédiction sur l’humanité et c’est la dernière chose que Jésus fera avec ses disciples avant de monter au ciel. Dieu est un Dieu bénissant. Notre Dieu est absolument hors toute catégorie : il s’est mis à genoux pour laver les pieds de ses disciples ; il s’est mis à genoux à Gethsémané devant son Père pour trouver la force de nous aimer encore et encore, jusqu’au bout. J’imagine Dieu le Fils se mettre à genoux devant le Père et devant le Saint Esprit pour leur dire son oui à la mission de venir parmi nous et d’aller en croix pour nous. Dieu à genoux pour nous aimer. Jésus a dit : Je suis venu non pour être servi, mais pour servir[3]. Avons-nous conscience de cela ? Méditer cela nous permet de tourner le dos à toute tentative de notre part de vouloir arracher de Dieu quelque récompense que ce soit en échange de notre prière ou de notre obéissance[4]. Il nous a déjà tout donné et continue à tout donner. Tous ses bienfaits : si tu peux t’adresser à Lui c’est qu’il a déjà pardonné toutes tes iniquités ; si tu peux le prier c’est qu’il a déjà si souvent guéri ta vie de ses maladies et faiblesses ; si tu le bénis et regarde dans la même direction que lui tu vois qu’il a déjà délivré ta vie de la mort.
Avant de conclure, je nous laisse une piste pour que notre prière soit occasion de vivre la présence de Dieu. Sarah nous disait lors du culte du 26 janvier qu’elle s’était engagée à d’abord passer 5 minutes par jour pour écouter Jésus. Ce qu’il faut retenir de cela c’est que toi, tu dois décider combien de temps tu vas passer avec Jésus, avant de commencer. Par ex. tu te dis : je prends 10 minutes pour bénir Dieu et être dans sa présence. Et puis, tu t’y tiens. Tu peux dire aux tourbillons de tes pensées de revenir dans 10 minutes.
Je conclus. Thérèse Glardon dit : à la fin de la journée, pourquoi ne pas prendre notre âme, plus ou moins satisfaite ou défaite, comme un enfant sur nos genoux, pour l’apaiser, la bercer, en lui parlant pour la consoler en lui montrant tous les bienfaits de la journée ? Tout vient de cette bonté de Dieu et tout retourne à Lui. Le négatif même est ainsi désamorcé[5].
Se discipliner à vivre cela avec notre âme nous permet de goûter à la vie du Royaume des cieux ici-bas, car nous verrons les signes du Règne de Dieu dans nos journées.
Mon âme, bénis l’Eternel, bénis son saint nom et n’oublie aucun de ses bienfaits. Amen.
[1] Thérèse Glardon, Ces psaumes qui nous font vivre, éd. Ouverture, Mont-sur-Lausanne, 2014, p.158.
[2] Ps 42:5 Pourquoi t’abats–tu, mon âme, Et gémis–tu sur moi ? Attends–toi à Dieu, car je le célébrerai encore Pour son salut. 6 Mon Dieu, mon âme est abattue à mon sujet : C’est pourquoi, je me souviens de toi, depuis le pays du Jourdain, Depuis l’Hermon, depuis la montagne de Mitsear. 11 Pourquoi t’abats–tu, mon âme, et gémis–tu sur moi ? Attends–toi à Dieu, car je le célébrerai encore ; Il est mon salut et mon Dieu.
Ps 43:5 Pourquoi t’abats–tu, mon âme, et gémis–tu sur moi ? Attends–toi à Dieu, car je le célébrerai encore ; Il est mon salut et mon Dieu.
Ps 57:8 Réveille–toi, mon âme ! Réveille–toi, mon luth ainsi que ma harpe ! Je réveillerai l’aurore.
Ps 62:5 Oui, mon âme, fais silence devant Dieu ! Car de lui vient mon espérance.
Ps 103:1 De David. Mon âme, bénis l’Éternel ! Que tout en moi (bénisse) son saint nom ! 2 Mon âme, bénis l’Éternel, Et n’oublie aucun de ses bienfaits ! 22 Bénissez l’Éternel, vous toutes ses oeuvres, Dans tous les lieux où il domine ! Mon âme, bénis l’Éternel !
Ps 104:1 Mon âme, bénis l’Éternel ! Éternel, mon Dieu, tu es infiniment grand ! Tu es revêtu d’éclat et de magnificence ! 35 Que les pécheurs disparaissent de la terre, Et que les méchants ne soient plus ! Mon âme, bénis l’Éternel ! Louez l’Éternel !
Ps 146:1 Louez l’Éternel ! Mon âme, loue l’Éternel !
[3] Mat 20,28 et Mc 10,45.
[4] La 2e chose que j’aimerais partager avec vous concerne le 2e verset : Mon âme, bénis l’Eternel et n’oublie aucun de ses bienfaits. Nous connaissons bien ce verset car il est repris par un de nos vieux cantiques. Mais qui aurait imaginé que le mot bienfait peut aussi se traduire par rétribution.
[5] Thérèse Glardon (2014), p.159.